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Marie-Madeleine, résidente de la Maison régionale solidaire pour les femmes – CHU Villiers

Résidente de la Maison régionale des femmes - CHU Villiers depuis le 27 novembre 2020, Marie-Madeleine a accepté de nous raconter son parcours.

C’est dans le hall du centre que nous avons rencontré Marie-Madeleine.

« Je suis arrivée le jour de l’ouverture. Je n’arrivais pas à croire que c’était vrai. Je dormais depuis un an dans les bus de nuit et, parfois, des centres hébergement tels que le Chapsa de Nanterre, via le 115. Un jour, le 115 m’a envoyé un mail pour une orientation immédiate dans la Maison régionale du 17ème. J’ai cru que c’était une blague, et je les ai appelés pour savoir si c’était vrai. Ils me l’ont confirmé !

Mais c’est quand je suis arrivée que j’ai vraiment compris que c’était réel. C’était une maison, il y avait un lit, il faisait chaud, c’était incroyable.

Je n’en croyais pas mes yeux. Avoir été choisie pour ça…

Et on m’a dit : « pour un an » ! J’ai demandé à la directrice si c’était réellement pour un an, j’ai pleuré quand elle me l’a confirmé.

Et ce quartier, dans lequel on nous accueille, en plein Paris ! Paris, c’est magique, quand on est à Paris, on se sent vivre…

Je suis née au Cameroun. Depuis toujours, je voulais travailler et vivre à Paris. C’était notre projet, avec ma meilleure amie. Et puis, à 19 ans, je suis allée en Italie avec mon bébé ; je ne sais pas pourquoi j’ai choisi d’y aller, mais je m’y suis sentie très bien et j’y suis restée. J’ai la nationalité italienne, maintenant.

Au Cameroun, je faisais beaucoup de sport, je courais beaucoup. En Italie, j’étais danseuse professionnelle. Pendant 30 ans, j’ai fait des tournées dans tous les cabarets du pays, du Nord au Sud. J’étais un peu une star !

J’ai voulu rejoindre mon fils qui était en France, j’ai donc quitté l’Italie il y a un an. Et là, je me suis trouvée face à une réalité incroyable : dormir dehors.

Dormir dehors, c’est très dur. En mars, on m’a volé tous mes papiers. J’ai dû retourner en Italie pour les refaire ; j’attends toujours mon passeport. J’ai dû prouver que j’avais bien la nationalité italienne, ce qui est très difficile quand on vit dans la rue. Et puis le covid complique et ralentit les démarches.

Quand je suis arrivée en France, je me suis domiciliée auprès de la Croix-Rouge. Il faut que je transfère ma domiciliation dans le 17ème, maintenant. Quand j’aurai mes papiers, je m’occuperai de mes problèmes de santé : j’ai mal aux genoux et au dos.

Je suis aussi en train de faire des démarches pour toucher ma retraite italienne. L’équipe m’a dit qu’ils allaient chercher un logement, mais pour payer le loyer, ma pension de retraite sera utile !

Ici, j’ai posé mes bagages. Ce que je vis en ce moment n’arrive qu’une fois, dans la vie ! J’ai 60 ans. J’avais peur de rester longtemps dans la rue. A mon âge, on n’a plus les forces d’avant. On se laisse aller plus facilement. J’avais peur pour mon futur ; être ici, ça me fait croire que je peux avoir des lendemains.

Ma chambre est au 2ème étage, je la partage avec une autre dame. Ca se passe bien ; on ne se connaissait pas, mais on s’entend bien. La chambre est jolie, on est bien. Je suis très contente d’être ici.

La première nuit que j’ai passée ici, avec ma voisine de chambre, on se disait « On n’y croit pas, on est ici, dans une chambre toute propre, dans un lit pour nous… ». On n’a pas dormi de la nuit.

L’équipe est gentille, elle fait bien son travail. Ils anticipent nos besoins. Quand on leur demande quelque chose qui nous manque, ils y ont déjà pensé ! Et puis ils nous demandent notre avis, et si on a des idées, et ils tiennent compte de ce que nous pouvons suggérer. Ils nous demandent toujours comment nous allons.

Quand on est dehors, quelle vie de solitude… Personne ne nous demande jamais notre avis.

Mon fils a 40 ans, maintenant, c’est un monsieur. Je suis dans la même ville que lui, on se voit régulièrement, ça me fait plaisir. Et il est rassuré que je sois ici. »