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Laurent Zylberman
©Laurent Zylberman

Motion : Aurore refuse de remettre à la rue les réfugiés

Le 1er janvier 2019, l’Etat a mis en place une réforme des centres d’hébergement d’urgence pour migrants : auparavant, les publics migrants étaient hébergés sans tenir compte de leur statut (demandeur d’asile, dubliné, réfugié…), avec un accompagnement qui s’adaptait à leurs besoins. Ainsi, les demandeurs d’asile ont désormais vocation à être hébergés en HUDA (Hébergement d’Urgence pour Demandeurs d’Asiles) et les réfugiés ont vocation à être hébergés en CPH (Centre Provisoire d’Hébergement).

Au-delà des efforts de gestion qui ont été nécessaires pour tenir compte des baisses budgétaires liées à cette réforme le véritable enjeu est dans la fluidité : un demandeur d’asile en HUDA qui obtient le statut de réfugié a vocation à aller dans un CPH à défaut de trouver directement un logement ou un hébergement. Or, aujourd’hui, la fluidité est très lente en Ile-de-France : nous observons que les durées de séjour s’allongent du fait des difficultés à organiser des sorties vers le logement. Comment dès lors penser que cette fluidité pourrait s’accélérer en sortie de CPH, afin de libérer des places pour ceux qui sortent des HUDA ? Certes, un effort a été fait pour créer davantage de places de CPH, mais, à ce jour, force est de constater que la chaîne ne fonctionne pas.

La réponse apportée par le Ministère de l’Intérieur consiste aujourd’hui à mettre la pression sur les associations gestionnaires, en leur donnant trois mois pour trouver une solution à une personne en HUDA qui vient d’obtenir le statut de réfugié. Passé ce délai, la personne perd ses droits et l’Etat nous demande de la remettre à la rue sans autre considération.

Pourtant, le sujet des personnes réfugiées statutaires hébergées dans nos centres a été au cœur des échanges entre notre nouvelle autorité de tutelle, le Ministère de l’Intérieur, et les associations gestionnaires au moment de la mise en œuvre de la réforme. A plusieurs reprises, l’Etat s’est engagé à ne pas remettre à la rue ces personnes et à leur trouver une solution d’hébergement ou de logement. Nous constatons que l’Etat revient sur cet engagement. C’est d’autant plus choquant que les campements dans et à la périphérie de Paris se multiplient dans des conditions sanitaires dramatiques.

Nous pouvons accepter d’avoir des objectifs de résultat sur le travail d’accompagnement, dès lors que ceux-ci tiennent compte de la réalité de la fluidité du secteur ; nous ne pouvons pas accepter un système qui ne garantit pas la sortie des personnes vers des solutions pérennes. Il s’agit d’abord d’un principe éthique car les "sorties sèches" ont pour seule conséquence, aussi incohérente qu'inadmissible, de produire de l'exclusion et d'entretenir le sans-abrisme, en rejetant massivement des personnes et des familles à la rue. Mais il s’agit aussi d’un principe républicain : la rupture brutale d’accompagnement compromet gravement l’intégration de ces personnes dans notre société.

En conséquence, nous, association Aurore, après délibération de notre Conseil d’Administration, nous engageons à mettre en oeuvre le principe de continuité de l'hébergement jusqu'à ce qu'une solution d'hébergement ou de logement pérenne puisse être proposée aux personnes réfugiées en HUDA et nous demandons à l’Etat de maintenir la prise en charge financière de ces places, par cohérence avec les politiques publiques d’intégration et de lutte contre l’exclusion.

Nous considérons, par ailleurs, et pour les mêmes raisons éthiques, que toutes les personnes qui ne peuvent plus se maintenir dans les centres en raison d'un rejet définitif de leur demande d'asile ou du retrait des conditions matérielles d'accueil (CMA), doivent soit se voir proposer une place en centre d'aide au retour (CARA), soit être orientées vers le 115 et un hébergement d’urgence. Il en va dans ce dernier cas du principe d’inconditionnalité de l’accueil que nous revendiquons et qui est inscrit dans la loi.

Enfin, le fait même que des campements continuent de se constituer dans Paris et aux portes de la capitale montre que le système est à bout de souffle. Nous demandons à l’Etat de mettre un terme à ces campements et pour cela la mise en place d’une politique d’hébergement d’urgence qui vise au respect de la dignité humaine et évite les situations dégradantes et dangereuses. 

 

Pierre Coppey, président de l'association Aurore 

Eric Pliez, directeur de l'association Aurore 

 

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